7 déc. 2025

Expliquer pour mieux conduire : outils pratiques pour les chefs d’établissement

Femme en tenue militaire souriant, bras croisés, illustrant l’idée d’un leadership clair et structuré dans l’Enseignement catholique.

Dans un établissement scolaire, l’autorité ne s’impose pas : elle s’explique. Plus nous partageons le sens de nos décisions, plus nos équipes gagnent en autonomie, en coopération et en sérénité. Comme le rappelle Hervé Jouffe, « plus vous expliquez, moins vous avez besoin d’être autoritaire ». Cette intuition prend tout son sens dans nos écoles, collèges et lycées, où la compréhension du “pourquoi” conditionne la qualité du travail collectif.

Donner le contexte

Lorsqu’une décision arrive sans contexte, les incompréhensions et les résistances apparaissent rapidement. À l’inverse, dès que le cadre, les intentions et les objectifs sont clairement posés, le climat change : moins de frictions, davantage d’initiatives, une dynamique plus fluide. Expliquer, ce n’est pas se justifier. C’est donner à chacun les clés pour agir en intelligence et en responsabilité.

Partager le contexte est une première étape essentielle. Rappeler ce qui a conduit à la décision, les contraintes identifiées et les objectifs poursuivis permet d’éviter les interprétations multiples. Un simple canevas « nous avons observé…, nous devons répondre à…, notre intention est de… » suffit souvent à apaiser et à orienter la discussion.

Donner une direction plutôt qu’un ordre

Formuler clairement l’intention constitue la deuxième étape. L’intention, trop souvent implicite, donne pourtant la direction profonde de notre action : améliorer le climat scolaire, renforcer la cohérence pédagogique, mieux accompagner les familles, simplifier des procédures... Dès que l’intention est explicitée, les équipes se sentent reconnues et peuvent contribuer activement.

Le moteur de l’adhésion

Vient ensuite le “pourquoi”. L’adhésion ne naît jamais d’une injonction, mais de la compréhension du sens. Se demander : « serais-je capable d’expliquer cette décision en une phrase à un parent ? » est un bon test de clarté. Si la réponse est non, la décision mérite encore d’être travaillée.

Anticiper

Expliquer, c’est aussi anticiper les questions : qui cela impacte, quels ajustements du quotidien, quels bénéfices pour les élèves, quel accompagnement prévu. Y répondre en amont réduit les inquiétudes et montre que les équipes ont été considérées dans le processus de décision.

Délivrer un message structuré

Pour structurer cette démarche, un canevas simple peut être utilisé. Adapté des méthodes opérationnelles évoquées par Hervé Jouffe, il comporte huit points :

  • le contexte, 
  • l’intention, 
  • les objectifs, 
  • les contraintes, 
  • les marges de manœuvre laissées aux équipes, 
  • l’accompagnement prévu, 
  • les points d’attention et les prochaines étapes. 
Ce cadre évite les oublis, clarifie les responsabilités et facilite l’autonomie.

Outils pratiques pour aller plus loin

Au-delà de ces principes, quelques outils très concrets peuvent aider à installer durablement une culture de l’explication :

  • Le canevas “décision expliquée” en 6 points : ce que nous avons observé, ce qui nous oblige à agir, notre intention, la décision prise, les impacts concrets, les marges d’adaptation.
  • Le brief pédagogique : objectif, résultats attendus, rôles, points de vigilance, ressources, critères de réussite.
  • La boucle de retour “24 h – 7 jours” : accusé de réception rapide, réponse structurée dans la semaine.
  • La reformulation explicative : remplacer une injonction par une explication du sens et des bénéfices pour les élèves.
  • Le rituel “intention – action – sens” en réunion, pour donner immédiatement une direction claire.
  • Le “passeport décision” du chef d’établissement : vérifier la nécessité, la clarté, l’alignement éducatif, l’impact et les marges de manœuvre.
  • Le “quart d’heure d’explication” hebdomadaire, qui crée une culture de transparence régulière.
  • Le cercle de questions ouvertes, une fois par période, pour éclairer les zones de flou.
  • Le journal de bord “ce que j’explique / ce que j’oublie d’expliquer”, un outil d’auto-progression continue.

Ces outils ne sont pas seulement opérationnels : ils installent une manière de piloter qui renforce la confiance et la cohérence collective.

La clé de la confiance

Enfin, une décision expliquée doit toujours laisser un espace d’ajustement. Expliquer n’est pas verrouiller. C’est préparer, puis co-construire. Terminer par « comment pouvons-nous adapter cela ensemble pour que ce soit efficace pour vous et pour les élèves ? » renforce la confiance et l’engagement.

Une perte de temps ?

Expliquer n’est pas une perte de temps. C’est un investissement qui simplifie profondément la conduite d’un établissement. C’est aussi la condition pour construire une autorité apaisée, partagée et authentiquement éducative. Une autorité qui fait grandir les équipes autant que les élèves, et qui permet au chef d’établissement de piloter avec plus de hauteur et de sérénité.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire