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24 janv. 2021

Innover et persévérer

Bertrand Piccard est un homme à part. Psychiatre et aéronaute suisse, il se définit comme un explorateur des mondes intérieurs et des mondes extérieurs. Il a co-développé et co-piloté l'avion solaire Solar Impulse pour réaliser un tour du monde de mars 2015 à juillet 2016.

En lisant et écoutant ses récits sur cette dernière aventure, je me suis demandé comment il était possible d’être aussi innovant et persévérant.

A quel moment, il a pu se dire : “Moi je vais faire voler un avion qui aura pour carburant le Soleil.” Comment peut-on se dire qu’on va se lancer dans une aventure vouée à l’échec d’après tous les spécialistes de l’aéronautique ?

Je vous résume son explication.


Une grande partie des inventions tient à un changement de paradigme, un changement de vision du monde. Prenons l’exemple de l'ascension de l’Everest. Pendant des siècles, les Tibétains et Népalais n’ont jamais tenté cette ascension, car ils n’avaient pas le droit de profaner la montagne. C’est seulement le 29 mai 1953 que les premiers hommes, lors d’une expédition anglaise, ont effectué cette ascension. 

Cela montre que nous avons, dans la vie, des filtres qui nous empêchent de réaliser certaines choses. Fort heureusement certains filtres sont là pour sauver notre vie. Nous avons appris à nous laver les mains pour nous défendre des virus et autres bactéries. Mais il y en a qui nous empêchent d’oser, qui nous empêchent d’aller de l’avant. 

Quand Bertrand Piccard a proposé le projet Solar Impulse, tous les constructeurs aéronautiques l’ont refusé. C’est un chantier naval (oui, un chantier naval !) qui a accepté, car il ne savait pas que ce n’était pas possible. Il n’avait pas ces filtres liés à l’aéronautique.

L’un des freins était que le Soleil ne pouvait pas produire assez d’énergie. Effectivement, en ne changeant pas de point de vue, c’est impossible. Mais en construisant un avion qui a moins besoin d’énergie, cela devient possible. 

Solar Impulse, c’est un projet “monstrueux” :

  • 1999 : premières réflexions
  • 2002 : travail personnel sur le projet
  • 2003 : lancement du projet
  • 2009 : premier avion
  • un projet 4 à 5 fois plus cher que prévu
  • un projet qui a duré deux fois plus longtemps
  • des catastrophes…

Incroyable persévérance ou fol acharnement

La persévérance, ce n’est pas de refaire de la même façon là où on a échoué. 

Et des échecs, il en a connu. 

Par exemple, lors de son premier essai en ballon, il avait appelé la presse… Et son ballon a échoué dans la Méditerranée. Sa fille ne voulait plus aller à l’école de peur des moqueries. Il lui explique alors que c’est normal. Que ce premier essai et que d’avoir convoqué la presse étaient ridicules. Mais ce n’était pas grave. 

Pour lui, le pire ce n’est pas de rater. Le pire, c’est de ne pas essayer.

La persévérance, c’est de refaire autrement là où on a échoué. Durant tout ce projet, d’autres personnes menaient des projets similaires. Elles n’ont pas réussi, car elles se sont acharnées, alors que lui a tout changé lors de chaque échec : le matériel, les procédures...

Nous, comme les élèves, avons nos filtres. Nous avons peur d’échouer. Et parfois, nous n’osons pas changer notre vision du monde, nous n’osons pas essayer. 

Pour cela, il nous faut renforcer notre confiance en nous-même.

Il faut apprendre à se pardonner. 

Une trop grande exigence altère l’estime de soi. On peut commencer par se dire ces quatre mots : “désolé”, “pardon”, “merci”, “je t’aime”. Pour chaque mot, on pense aux événements que l’on se reproche, à ceux qui se sont bien passés, en terminant par s’accepter tel que l’on est.

Il ne faut pas hésiter à pratiquer l’autolouange. On peut le faire à l’oral. C'est mieux à l’écrit. Énumérer ses qualités. Notez les moments de réussite pour ne jamais les oublier.

Pour se protéger du côté négatif d’un échec, il ne faut pas en faire une affaire personnelle. Prenez du recul, de la hauteur. 

Enfin, bannissez les phrases négatives : “Je n’y arriverai pas…” 

Un jour, un pilote de Solar Impulse a dit à Bertrand Piccard qu’il n’était pas assez bon pilote pour piloter cet avion. Cela l’a complètement désarmé. Il a remis en question cette affirmation. Soit ce pilote a raison, soit il a tort. Et s’il a raison, soit je laisse ma place soit je deviens un meilleur pilote. Et pendant presque un an, il a piloté tout type d’appareil pendant des heures et des heures de vol. Puis il a volé à nouveau avec ce pilote pour lui montrer ses progrès. Ce dernier lui a alors dit : “C’est un autre Bertrand Piccard qui a piloté aujourd’hui. Tu es maintenant capable de piloter Solar Impulse.”

Comme Bertrand Piccard, soyons innovants et persévérants.

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