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20 sept. 2020

Peut-on être directeur sans être expert ?

Tout le monde le sait. Etre directeur-trice, c’est être pompier, factotum, animateur-trice, gendarme, concierge, psychologue… et j’en passe. Bref tout le monde pense que c’est un expert dans tous les domaines. En cas de problème, tout le monde se tourne vers elle ou lui en le suppliant, en lui donnant l’injonction de trouver une solution immédiatement, maintenant et tout de suite. 

Vu l’ampleur des responsabilités qui nous sont confiées, il y a de quoi baisser les bras et abandonner. Alors quand on prend une direction, devient-on subitement un héros de Marvel ?

C’est à la fois vrai et faux. Je t’explique mon point de vue sur cette croyance.



Plus qu’être un expert dans tous les domaines, le ou la dirlo vit ou subit différentes expériences. Il y a le petit Kévin qui a bouché les toilettes avec de la terre et des feuilles, la fuite de gaz, les ardoises qui se sont envolées, un cambriolage qui tourne au vandalisme et peut-être le plus important l’orientation de cet élève qui perd pied... Il-Elle doit prendre les bonnes décisions tout au long de la journée. 


De cette problématique, je vois deux choses :

  • doit-on être expert partout ?

  • comment prendre la bonne décision ?


Le chef d’établissement doit-il être expert dans des domaines aussi divers que la psychologie ou la plomberie ?


Bien sûr que oui ! On ne te l’a pas dit quand tu as accepté cette mission. Tant pis pour toi alors… Oui. On a cette impression pour trois raisons :


  1. On attend beaucoup de toi. L’organisme de gestion, la tutelle, les collègues, les parents, les enfants… La mairie, l’IEN… Tout le monde attend beaucoup de toi. Et chacun pour des raisons différentes. Je te laisse deviner lesquelles. J’aime à dire parfois que, pour les enfants, il y a au dessus de tout Dieu, juste en dessous il y a le directeur, puis en dessous l’enseignant et vient ensuite le parent. On s’amuse de cela. Mais c’est un peu vrai et pas uniquement dans la tête des enfants.

  2. Tu dois savoir tout faire. Encore oui. Tu dois tout savoir sur tout. Comme chacun te perçoit comme l’être unique, chacun pense que tu sais tout. Moi, je préfère dire que je ne sais pas grand chose mais que j’arrive à résoudre beaucoup de problème. Et que je n’y arrive qu’avec un travail de collaboration.

  3. Tu dois être partout. Et oui partout. On m’a quand même demandé si je ne pouvais pas venir au domicile d’une famille pour que l’enfant se mette en pyjama plus rapidement. Tu dois être aussi en réunion à la mairie, à la DDEC, à droite et à gauche parfois le même jour. Apprends à dire non. Non. Tout simplement. Sans avoir besoin de te justifier. Par contre, on peut voir le “être partout” en “vivre la vie d’un autre”. C’est toujours intéressant de remplacer un-e collègue, un-e collaborateur-trice.. Tu apprends plein de choses. Tu comprends surtout les problématiques de ces personnes.


Alors c’est pas vraiment vrai. C’est même surtout faux, mais…


  1. L’attente est vraiment là. Tu dois l’assumer, vivre avec. Cela ne sert à rien de se cacher derrière un “Je ne sais pas faire” ou un “Je ne sais pas. Débrouillez vous.”. Il faut trouver une réponse. Tu as le droit de reporter ta réponse par un “Je vous remercie de m’avoir poser la question. Je vais y répondre sans plus tarder d’ici demain ou la semaine prochaine.” Là tu montres que tu as entendu la demande et que tu vas donner une réponse d’expert.

  2. Certains dirlos vont chercher à exceller partout. Certains font des burn-out. A toi de voir. Le perfectionnisme est un piège dangereux. On peut croire que, d’être partout, de tout maîtriser, ça gagne du temps. C’est surtout le meilleur moyen de se planter. Tu trouveras toujours des gens meilleurs que toi dans certains domaines.

  3. C’est tout simplement im-po-ssi-ble. La seule solution pour survivre et être ce super héros. Tu dois déléguer, mais ça ne veut pas dire que tu ne dois pas savoir où en sont les choses. Mais ça, on pourrait en parler une autre fois, si tu le souhaites.


Etre un dirlo expert, cest...


Un-e bon-ne dirlo c’est quelqu’un qui réussit à s’entourer des meilleurs dans leur domaine. Certes il n’a pas trop le choix des enseignants. Mais parmi eux, il y a certainement d’excellents ou d’excellents refoulés. Des refoulés ? C’est à dire des enseignants qui n’osent pas se mettre en avant ou prendre des responsabilités. 

Pour tout ce qui est des travaux, fais appel à des entreprises extérieures. Il faut “juste” réussir à trouver les meilleures. Celles qui réduiront une quantité d’ennuis après les travaux. Avant que j’arrive dans l’un de mes établissements, l’école avait fait installer une chaudière - bon rapport qualité/prix. Oui, mais… la chaudière fonctionne très mal et l’entreprise a fermé quelques mois après. Au final, c’est une quantité d’ennuis qui s’ajoutent pour des dizaines d’années.

Un-e bon-ne dirlo, c’est quelqu’un qui prend de bonnes décisions. Facile à écrire...


Comment savoir si on prend la bonne décision ?

J’ai lu dans Vous allez commettre une terrible erreur d’Olivier Sibony, que l’intuition est une faculté très fragile. Un jour, un pompier entre dans une maison pour rejoindre son équipe. Puis soudain, il fait évacuer la maison juste avant que celle-ci ne s’écroule. Il ne sait pas pourquoi. Il l’a senti. Des chercheurs ont compris que le pompier peut sentir que la maison va s’effondrer car quand il est entré, la situation maintes fois vécue dans d’autres situations extrêmes était différente. Il a en un instant analyser la situation et compris qu’elle était différente et donc potentiellement extrêmement dangereuse.

D’autres chercheurs prouvent le contraire. Ils montrent que l’intuition nous induit en erreur. Ils ont pour cela demander à des statisticiens chevronnés d’estimer des tailles d’échantillons. A chaque fois, ils se trompaient.


Dans quelles situations, peut-on se faire confiance ?

L’intuition experte est fiable dans un environnement régulier (et donc prévisible), pratique, durable avec la possibilité d’avoir un retour rapide et clair sur la situation. Donc il est impossible à certains corps de métier de travailler à l’instinct. Un-e pompier, un-e pilote de chasse, un-e joueur-se d’échec peuvent avoir de l’intuition quand ils sont expérimentés. On oublie pour les psychiatres, les juges… et les profs.

Et pourtant l’intuition influence en permanence notre jugement. Olivier Sibony explique que d’une “manière générale plus une décision est stratégique, moins l’intuition est bonne conseillère.” 

Nous devons donc nous en remettre aux faits et aux regards extérieurs. C’est là que la communauté de pairs peut avoir un grand rôle. Sur Facebook, il existe plusieurs groupes comme “Un dirlo et une dirlette sont dans une galerre” ou “Directrices et directeurs d'école: entraide et partage de ressources”ou d’autres encore permettent de déposer des questions et de trouver des solutions variées. Reste ensuite à analyser les solutions proposées dans le cadre qui est le tien.


En conclusion

Voilà cet article est sans doute décevant : nous ne sommes pas des superhéros. (Quoique - On pourrait en reparler si tu le souhaites) 

Juste des femmes et des hommes qui devons prendre les meilleures décisions dans le meilleur des mondes possibles. Et pour cela. Peut-on être directeur sans être expert ?


A dimanche prochain ?


On parlera de monter un projet numérique.

Tu peux me laisser dans les commentaires des questions, des choses que tu souhaites que je parle.


A moins que, tu souhaites me retrouver chaque semaine sur le podcast “Le Rendez-vous du mercredi”. Ce qui m’anime, c’est de partager mes astuces, mes idées, mes projets, mes rencontres.


Alors à mercredi prochain ?


Voici les liens de différentes plateformes :

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